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Les inaperçus de la New Wave (1) : The Books

Dernière mise à jour : 28 sept.



Il y a quelques temps j'avais lancé ici même, sur ce site, une rubrique intitulée "Seconds couteaux" de la New Wave. Enfin, je n'avais même pas précisé le style musical, cela allait de soi. Je l'avais utilisé de manière un peu provocatrice, tout en anticipant déjà les retours éventuels des potentiels lecteurs, surpris par cette formulation. C'est avec The Essence que j'ouvrais le bal (ils me semblaient parfaitement être représentatif de cette idée), mais en y regardant de plus près j'avais réellement commencer avec Fra Lippo Lippi. Les seconds couteaux dans ma tête, se sont des projets qui se sont illustrés avec une œuvre remarquable, mais qui n'ont pas rencontré de succès commercial (ou parfois si, mais occasionnellement), ou qui n'ont pas réussi à intégrer le "panthéon", celui de la reconnaissance éternelle pour l'inconscient collectif. Comprenez par là, qu'un second couteau est un groupe ou un artiste qui a une discographie absolument recommandable, mais dont peu de gens connaissent l'existence, ou qui ne sont connus que d'une poignée (bien sûr à l'échelle planétaire ça peut faire beaucoup).


Il y a quelques temps, l'idée m'est venu, de mettre, cette fois-ci, en avant des projets carrément inconnus (ou alors connus par un tout petit nombre de personnes), avec souvent une discographie très réduite (un seul album par exemple à leur actif ou quelques singles et/ou Ep). Je qualifie ces groupes "d'inaperçus". Quand j'emploie ce terme, je fais référence à un groupe qui, malgré ses qualités musicales ou sa créativité, n'a pas reçu l'attention qu'il méritait. Cela peut signifier qu'il est passé sous le radar des grandes maisons de disques, de la presse spécialisée, ou qu'il n'a pas réussi à capturer l'engouement populaire, souvent éclipsé par d'autres artistes contemporains plus médiatisés. Les raisons peuvent varier : un style trop avant-gardiste pour l'époque, un manque de promotion, un label foireux, une distribution catastrophique, une conjoncture défavorable ou simplement tout à la fois.

Cependant, un groupe inaperçu n'est pas nécessairement dénué de talent. Au contraire, ce terme souligne souvent une reconnaissance tardive ou restreinte à une niche de passionnés. Les groupes inaperçus sont parfois redécouverts des années après, bénéficiant d'une réévaluation critique, ou d'un culte auprès d'un public plus averti. Leur musique peut être perçue comme ayant été en avance sur son temps, ou tout simplement mal compris à sa sortie.

J'ai toujours eu un réel plaisir à découvrir ce genre de perle dans mes pérégrinations. Quel plaisir de tomber sur un skeud, de n'en connaître rien, de le prendre tout de même, en se disant "sait-on jamais...", de le mettre sur sa platine et de découvrir qu'il est absolument extraordinaire, et qu'en plus c'est le seul du projet en question.

En y repensant j'avais inauguré cette rubrique en évoquant notamment le disque de Neale Jackson il y a quelques mois, où je raconte cette "rencontre" impromptue dans un Leclerc Occasion, avec l'artiste et son unique album. Il est à noter que bien souvent ces disques sont peu couteux, puisqu'il n'intéresse personne. Parfois bien sûr, il existe des albums de projets "inaperçus" qui sont devenus tellement cultes, qu'ils peuvent avoir un coût exorbitants aussi. Mais c'est une autre histoire... Dans tous les cas, j'apprécie particulièrement ensuite passer du temps à faire des recherches et à obtenir des informations sur ce projet, bien souvent celles-ci sont quasi inexistantes, ou au mieux parcellaires. C'est un peu frustrant, mais cela rajoute du piment à la démarche.


Là immédiatement il s'agit de parler de l'unique album d'un groupe anglais (de Londres vraisemblablement d'après ce que j'ai réussi à trouver, oui, oui de Londres et non pas de New-York) "Expertise" du groupe The Books (à ne pas confondre avec le projet ricain de musiques électroniques des années 2000 qui sortait ses disques chez Tomlab), sorti en 1980 sur le label Logo. Le groupe a sorti cette même année 3 singles, toujours sur le même label, et puis ensuite plus rien.


Ce disque m'est arrivé par hasard, comme toujours. A l'époque où j'avais ma boutique, un gars venait régulièrement, du Lot je crois, avec des lots de skeuds, dont il voulait se séparer, et se servir d'échange contre d'autres que j'avais dans les bacs. La plupart du temps je ne connaissais rien, ils étaient en bon état. Je ne gagnais sans doute pas grand chose au change, en y réfléchissant, car lui prenait de belles pièces. Une fois il m'avait même amené des vieilles affiches de cinéma (que j'ai encore). Ce disque des Books est allé rejoindre les rayons, sans que je n'y prête vraiment attention, juste une petite écoute rapide, histoire de voir quel était le style approximativement. Ce n'est que bien des années après, bien après la fin de mon commerce, qu'en fouillant, je suis retombé dessus. Il n'était évidemment jamais parti. Je me décidais alors à le monter à l'étage dans le salon et à le mettre sur ma platine. Et la vie ne fût plus tout à fait la même...


The Books donc, est un projet complètement méconnu de la scène New Wave britannique. Il est souvent comparé, à juste titre (par ceux qui en ont daigner y jeter une oreille) à des groupes comme les Talking Heads ou DEVO, avec une forte influence Synth-Pop et Post-Punk. Un groupe anglais donc qui sonne new-yorkais.


"Expertise" est produit par Colin Thurston (qui a également travaillé avec Duran Duran, sur leurs deux premiers albums, mais aussi sur le second Magazine, sur le "Party's Over" de Talk Talk ou sur "The Fury" de Gary Numan). Le disque met en avant des sons électroniques assez expérimentaux, des effets parfois un peu "excentriques", et témoigne d'une production soignée qui caractérise bien l'époque.


Le groupe est composé de Chris Pyzer Pye (guitare), Lynda Berger (, piano et "cat" synthétiseurs), Paul Moon (batterie), Robert Kelly (basse) et Stephen F. X. Betts. Ce dernier (de son vrai nom Steve Betts, né en 1952 dans les Cornouailles) fait figure de leader et de compositeur principal. Il est au chant et aux claviers également.


Cet album se distingue par son mélange de sons synthétiques avec des éléments plus rock, créant des atmosphères intrigantes. On y trouve des morceaux notables tels que "Spillane", "Dusters", "I'll Be Your Friend", qui explorent différents styles tout en restant dans l'esthétique New Wave.

The Books a une approche qui mêle des rythmes saccadés à des lignes de synthés froides et mécaniques. Les thèmes lyriques abordent des questions abstraites, mêlant des réflexions philosophiques avec un ton souvent décalé et ironique. Il y a aussi une dimension visuelle et presque cinématographique dans les compositions, avec des titres comme "Rain", "Ballroom Debut" ou "Expertise" le morceau éponyme qui suggèrent des images vives à travers l'utilisation astucieuse des textures sonores et d'effets synthétiques​.

L'album dans sa globalité est nerveux, agité et globalement "barré", le groupe apparait effectivement comme des cousins anglais de DEVO, le titre "Osterreich" (et son accordéon) illustre bien ce propos, tout comme "Hirohito". C'est particulièrement inventif, riche, et ça passe à cent à l'heure. Impossible de se reposer. Aucune pause envisageable (à l'image de "Broadcast" le titre introductif, pied au plancher et coup d'accélérateur). Seul sur la fin l'instru "Metaphysic" arrive à nous faire ralentir un petit peu, pour mieux repartir avec un final dantesque.


"Expertise" mérite votre attention. C'est véritablement une petite pépite pour les amateurs de New Wave/Post-Punk sous-estimé.

On peut l'envisager comme une exploration froide et introspective de la technologie (de l'époque), tout en y incluant une part d'humanité, dans une veine semblable à des groupes avant-gardistes de cette période. Son caractère expérimental par certains côtés, associé à une certaine efficacité mélodique (très Pop) en fait une œuvre absolument fascinante et totalement respectable et recommandable.


Ce disque est donc le seul album que le groupe ait réalisé. La faute a son "insuccès", la presse à l'époque y voyant, un projet peu original par rapport aux références évoquées plus haut. Pourtant aujourd'hui, quand on prend le temps de l'écouter, de le chercher, de le mettre sur sa platine on est estomaqué par sa modernité. Ça n'a pas pris une ride, pas une seule.

Son édition sur un obscur label, Logo, n'a sans doute pas arranger les choses. Une structure de ces années, qui n'a pas duré sur la longueur, et présentant une certaine diversité dans son catalogue (Métal, Disco). On y retrouve, seulement comme groupe "similaire" le projet des futurs Eurythmics, The Tourists, qui n'a pas suscité non plus de grand engouement il faut le dire.


Pour aller plus loin, on sait que Stephen F.X. Betts alias Steve Betts fera un peu de pige aux claviers chez The Associates quelque temps plus tard, sous le nom d'Howard Hughes. On retrouve le bonhomme aux manettes du premier album de Peter Murphy (ex Bauhaus, Dalis Car) "Should The World Fail To Fall Apart" pour la fabrication de la musique et dans sa participation instrumentale (claviers, piano...) en compagnie de John McGeoch (Magazine, Visage...). Au milieu des années 80, il lance Howard Hughes and the Western Approaches, un autre projet très intéressant (avec le rescapé guitariste Chris Pye des Books), un peu plus Indie. 3 singles sortiront entre 1986 et 1988. J'ai d'ailleurs retrouvé une participation de ce projet aux Transmusicales de Rennes en 1987 et une affiche partagée avec The Sound, Dole, Arno à une festival belge.

Puis on le retrouve bien plus tard, à composer de la musique sous son nom Steve Betts (ou celui de The Franklins), toujours encore, sans semble t-il l'éditer. Et c'est bien dommage. On le retrouve également sur le projet 60x60 en 2004, 2005 et 2006 avec des pièces sonores composées pour l'occasion. Je vous invite à écouter son Soundcloud, où vous retrouvez non seulement l'album "Expertise" de The Books en ligne (avec des photos des membres), puis de ses différents projets. Un must.



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